Fret maritime : Un contournement prolongé du canal de Suez déclenchera-t-il une nouvelle crise de la chaîne d’approvisionnement ?

TOF BANQUE MONDIALE
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À court terme, le secteur mondial du transport des conteneurs par voie maritime absorbera probablement le choc causé par les attaques contre les navires en mer Rouge, car la demande est généralement faible en janvier et février. Toutefois, si ces incidents se poursuivent en mars et avril, lorsque le commerce mondial connaît un rebond saisonnier, les contraintes de capacité pourraient déclencher une crise de la chaîne d’approvisionnement comparable à celle de 2021-2022.

Cette crise s’était produite lorsque le transport maritime de conteneurs s’est avéré incapable de soutenir la reprise des échanges internationaux à partir de la fin de l’année 2020. Les fermetures d’installations dues à la COVID-19 et le manque de personnel dans les ports ont contraint les navires à rester à quai pendant des jours, voire des semaines, avant de décharger leur cargaison, ce qui a eu pour effet de réduire le nombre de porte-conteneurs disponibles pour le transport de marchandises. La concurrence pour les créneaux horaires des navires a immédiatement fait grimper en flèche les tarifs d’expédition : le coût a été multiplié par huit sur les itinéraires entre l’Asie et l’Europe ou l’Amérique du Nord par rapport à 2019.

La source des tensions sur les chaînes d’approvisionnement est différente aujourd’hui, mais le résultat pourrait être le même. Les principaux transporteurs de fret, dont Maersk et Hapag-Lloyd, ont suspendu leurs opérations par le canal de Suez pour éviter la mer Rouge et déroutent leurs navires par le cap de Bonne-Espérance, ce qui ajoute 3 000 à 3 500 milles nautiques (5 500 à 6 500 km) et sept à dix jours au trajet habituel entre l’Europe et l’Asie. Selon les estimations, cette distance supplémentaire pourrait réduire la capacité de transport maritime de 700 000 à 1,9 million de conteneurs standard (équivalents vingt pieds, ou EVP).

Le chiffre le plus élevé est comparable à la capacité bloquée en 2021 au plus fort de la crise liée à la COVID-19, telle que mesurée par l’indice de tension sur les chaînes d’approvisionnement mondiales mis au point par la Banque mondiale. Cet indice est une estimation de la capacité immobilisée lorsque des retards excessifs sont constatés par rapport aux délais habituels de transport de port à port. Il est fortement corrélé aux volumes de fret, qui sont sensibles aux changements à court terme de l’offre et de la demande.

Les coûts supplémentaires de l’itinéraire autour du cap de Bonne Espérance — qui incluent jusqu’à un million de dollars de carburant pour chaque trajet aller-retour — se traduisent par des tarifs de transport maritime plus élevés. Maersk ajoute à ses tarifs de transport (contractuels et spots) un « supplément pour perturbation du transit » de 200 dollars par EVP pour les trajets entre l’Asie de l’Est, l’Europe du Nord, la mer Méditerranée et la côte Est des États-Unis. Cette majoration s’ajoute à une « surtaxe de haute saison » de 300 dollars et de 1 000 dollars par EVP. MSC, une autre compagnie mondiale de transport maritime par conteneurs, a déclaré qu’elle imposerait une « surtaxe pour circonstances exceptionnelles » de 500 dollars par EVP sur les expéditions de l’Europe vers l’Asie et le Moyen-Orient.

Les taux spot ont encore plus augmenté. Le tarif pour un trajet de l’Asie vers l’Europe a grimpé à plus de 3 000 dollars par conteneur de 40 pieds, soit trois fois plus que le tarif le plus bas en 2023 (environ 1 000 dollars). Cela pourrait refléter le fait que les exportateurs asiatiques se disputent à nouveau les créneaux d’expédition en prévision de perturbations majeures de la chaîne d’approvisionnement.  Heureusement, les mois de janvier et février sont des périodes calmes pour le transport maritime, de sorte que la capacité existante suffira probablement à supporter l’allongement d’itinéraire dans les semaines à venir. Néanmoins, la poursuite des attaques navales jusqu’en mars pourrait à nouveau avoir un impact significatif sur le commerce international et les chaînes de valeur mondiales.

Source : Banque Mondiale


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