Réunion stratégique entre le Canada et la BAD

La BAD a exposé sa nouvelle stratégie décennale à la délégation canadienne
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Une pleine intégration du genre

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« Le partenariat avec le Canada est très important pour nous. Ce partenariat est solide et il y a plusieurs choses que j’ai toujours appréciées à propos de la Banque Africaine de Développement, dont sa capacité à innover, notamment dans le cadre de la réforme des dispositifs d’adéquation des fonds propres des banques multilatérales de développement (…)

Au sommet Africain sur le climat, de nombreux dirigeants ont parlé du climat, des finances, des défis liés à l’accessibilité, de la demande de concessionnalité, entre autres (…) Il me semble qu’une voix de plus en plus forte, et peut-être plus unie, se fait entendre en Afrique, pour réclamer une modification des institutions financières internationales. » C’est ce qu’a déclaré Cheryl Urban d’emblée, dès l’ouverture de cette séance de travail tenue 17 jours après la Journée Internationale des Droits des Femmes.

Entourée de hauts responsables de la BAD, Bajabulile Swazi Tshabalala, quant à elle, est revenue sur diverses actions menées par l’institution panafricaine, en matière de genre. Parmi ces actions : L’initiative AFAWA (acronyme en anglais pour Initiative pour favoriser l’accès des femmes au financement en Afrique), qui vise à combler le déficit de 25.389 milliards FCFA de financement pour les entreprises détenues ou dirigées par des femmes, et l’adhésion de la Banque à l’initiative EDGE ((Equity, Diversity and Gender Equality).

Elle s’est également exprimée sur le travail pour la parité homme-femme effectué au sein même de la haute direction de la BAD. Toujours concernant le genre, la vice-présidente a indiqué que la nouvelle stratégie décennale, récemment adoptée, est orientée vers une intégration à 100% de la dimension du genre dans toutes les activités de l’institution. Sur cet objectif, « le Conseil d’administration de l’institution a été très clair. » A-t-elle souligné avec force.

Le financement de la transition énergétique

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Bien que l’Afrique soit le continent qui pollue le moins, c’est bien la terre mère qui subit le plus les effets des changements climatiques. Or, l’Afrique reçoit moins de 3% des financements climatiques mondiaux. Pour mettre fin à ce paradoxe, une augmentation des financements en faveur du Continent est donc nécessaire.

Une nécessité dont la BAD a bien conscience et à laquelle elle s’emploie à répondre. Ainsi, rien qu’en 2023, elle a consacré plus de 40% de ses ressources au financement climatique et reste, à ce jour, l’unique institution de financement du développement à avoir consacré plus de 50 % de ses financements aux changements climatiques (de 09 % en 2016 à plus de 50% en 2023).

Si elle a décidé de ne plus financer de projet de charbon, le gaz est pour elle, à l’heure actuelle, une énergie de transition dans le développement de l’Afrique, en attendant le développement, qu’elle soutient, de nouveaux combustibles propres pour l’industrialisation, comme l’hydrogène vert.

En outre, le Fonds Africain de Développement (FAD) a approuvé la création d’un Guichet d’action climatique. Cet instrument spécifique, destiné aux 37 pays les plus vulnérables du Continent, a déjà mobilisé 259,330 milliards FCFA. Il devra consacrer 75% de ses ressources à l’adaptation, 15% à l’atténuation et 10 % à l’assistance technique et au renforcement des capacités.

Durant cette rencontre Abidjanaise, Bajabulile Swazi Tshabalala a invité le Canada à rejoindre le Royaume-Uni, l’Allemagne, les Pays-Bas… au rang des donateurs qui ont permis au Guichet d’action climatique de lancer ses premiers appels à projets. Des appels à projets qui ont d’ailleurs suscité des centaines de demandes de financement et ont dépassé, de loin, les montants en jeu.

A cette invitation, Michel Lacourcière, a répondu ceci : « Sur le financement du climat, nous avons des ressources dédiées à l’identification et à la mobilisation de l’expertise Canadienne, pour pouvoir relever certains défis (…) Peut-être que c’est une piste à explorer pour notre collaboration dans le domaine des changements climatiques. » A ouvert le conseiller économique à l’ambassade du Canada en Côte d’Ivoire.

ODD et présence sur le terrain

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La vice-présidente principale de la BAD s’est aussi, pendant cette entrevue, attardée sur la Stratégie décennale de son Groupe. Une stratégie sur 10 ans récemment adoptée par son Conseil d’Administration, avec les contributions des gouvernements, de la société civile, des communautés économiques régionales et de l’Union Africaine (UA). Cette vision, alignée sur l’Agenda 2063 de l’Union Africaine et les Objectifs de Développement Durable (ODD) prend en compte les discussions, en cours, sur la réforme du système multilatéral de financement, ainsi que des biens publics mondiaux et régionaux.

Cette stratégie, a-t-elle signalé, inclut également la présence de la BAD sur le terrain. « Actuellement, sous différentes formes, l’institution panafricaine de développement est présente dans 43 des 54 pays régionaux. La présence sur le terrain fait une énorme différence dans la qualité du dialogue. Nous souhaitons avoir une présence physique en Amérique du Nord, en plus de celle que nous avons, à ce jour, en Asie, au moment où les gouverneurs nous poussent à mobiliser davantage de ressources institutionnelles et, surtout, les ressources du secteur privé. » Elle estime aussi que le Canada pourrait, de même, apporter un soutien important dans les domaines de la santé, de l’éducation et de la sécurité.

Jeunesse et intégration Africaine

Concernant l’appui à la jeunesse, Bajabulile Swazi Tshabalala a fait savoir que la BAD a créé la banque d’investissement pour l’entrepreneuriat des jeunes (YEIB) et s’investit, en plus, dans le Fonds de garantie pour l’Afrique car, « dans certains pays, les garanties sont très importantes. »

Quant à l’intégration régionale, outre les discussions renforcées avec les communautés économiques régionales, l’institution appuie le secrétariat de la Zone de Libre-Echange Continentale Africaine (ZLECAf). Pour la vice-présidente, le Canada peut jouer un rôle important dans la réalisation de la ZLECAf, en contribuant, par exemple, au renforcement de capacités et en fournissant un accompagnement technique au secrétariat de la ZLECAf et aux États, particulièrement les plus vulnérables. Cette année, la BAD va consacrer 20% de ses opérations aux projets intégrateurs, dans différentes régions.

Un partenariat tous azimuts

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Pour faire face à certains défis comme le financement des infrastructures, le climat, l’acheminement des droits de tirage spéciaux du Fonds Monétaire International (FMI) vers les banques régionales de développement, la BAD travaille en étroite collaboration avec d’autres banques multilatérales de développement et souhaite étendre ce champ au Canada, comme l’a explicitement formulé Bajabulile Swazi Tshabalala :

« En tant qu’actionnaires et partenaires de développement, nous comptons sur votre soutien (…) Le Canada peut aussi intervenir dans les nombreux fonds fiduciaire multidonateurs de la Banque ou des banques d’investissement pour l’entrepreneuriat des jeunes. » À propos des innovations, la BAD émet des obligations hybrides et a obtenu l’autorisation des gouverneurs du FAD de lever des fonds sur le marché financier international.

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A cette réunion, la vice-présidente principale de l’institution financière panafricaine de développement était accompagnée, entre autres responsables, de Catherine Baumont-Keita, sa directrice de cabinet et chargée du Département des opérations de gestion, Yvette Glele Ahanhanzo, directrice du front office du Complexe chargé du développement de l’intégration régionale, Valerie Dabady, chef de la Division mobilisation des ressources, finances et politiques et de Keffo Hervé PiKam, chef de la Division fonds fiduciaire, chargé des relations avec le Canada. La ministre Cheryl Urban, elle, avait notamment, à ses côtés, l’ambassadeur du Canada en Côte d’Ivoire, Anderson Blanc, la première secrétaire de l’ambassade chargée de la programmation panafricaine et régionale, Eve S. Beremwoudougou, la chargée principale des missions multilatérales à l’ambassade et assistante principale de l’administrateur de la Banque pour le Canada, Stéphanie Minou, la responsable pour le Cap Vert et le Liberia et ancienne responsable du portefeuille du Groupe africain de développement à Ottawa, Nicole Gesnot, et le chargé de programme pour le Sahel, Alexander, McGill. La BAD a invité le Canada à participer, avec ses entreprises, à la prochaine édition de l’Africa Investment Forum (AIF) prévue en décembre 2024, à Rabat, au Maroc. En 2025, le Canada succédera à l’Italie à la présidence du G7.

KOFFI-KOUAKOU Laussin