L’Intelligence Artificielle, une amie qui vous veut du bien ?
Seulement voilà ! Dans un monde virtuel où la ligne entre hackers éthiques et non-éthiques est multicolore, il est de plus en plus difficile de repérer et d’éradiquer les faux logiciels, les logiciels espions, les rançongiciels, les fichiers malveillants, les techniques d’hameçonnages… Sans parler des attaques directes. De plus, déjà que le droit avait du mal à suivre, le développement exponentiel du numérique et les dernières avancées de l’Intelligence Artificielle (IA) amènent à se poser de nombreuses questions et creusent, encore plus, le vide juridique en la matière.
Or, comme l’a déclaré Franck Kié, Commissaire Général du Cyber Africa Forum (CAF), durant son allocution d’ouverture de l’édition 2024 du Forum, un Forum qui s’est tenu les 15 et 16 avril 2024 et pour la 4ème année consécutive dans la capitale économique Ivoirienne : « La force d’un pays réside dans ses capacités à apprendre, à s’inspirer de ses actions passées pour bâtir, concevoir son futur. » Une assertion un plus à propos au moment où certains outils permettant d’écrire des codes malveillants, de créer des malwares indétectables ou des pages de phishing, et même de rechercher des vulnérabilités et des fuites de données, sont disponibles en abonnement mensuel pour à peine 123.500 FCFA.
Pourtant, alors que le coût de la cybercriminalité sur les économies Africaines était estimé à plus de 2.464 milliards de FCFA en 2022, selon l’Union Internationale des Télécommunications (UIT), et pourrait s’établir à 6.484 milliards FCFA, d’ici 2025, les données communément admises indiquent que l’Intelligence Artificielle pourrait contribuer à hauteur de 15,7% au Produit Intérieur Brut (PIB) Africain d’ici 2030, soit une valeur ajoutée de 741 milliards FCFA, et être créatrice de 20 millions d’emplois sur le Continent.
Longtemps anticipé dans les blockbusters hollywoodiens et dans les scénarii de science-fiction, il convient de rappeler que les systèmes d’Intelligence Artificielle n’en sont pas à leurs premiers pas. En effet, c’est en 1950 que le public les découvre. Cette année-là, Marvin Minsky et Dean Edmonds, tous deux étudiants à Harvard à l’époque, présente SNARC (Stochastic Neural Analog Reinforcement Calculator) au monde, le premier réseau neuronal artificiel.
Pour bonifier le tout, la même année, Alan Turing publie le Turing Test qui sert, encore de nos jours, à l’évaluation des modèles d’Intelligence Artificielle. 09 ans plus tard, Arthur Samuel, employé d’IBM, fait entrer, dans les lexiques, le terme Machine Learning : La Recherche et Développement (R&D) pour modéliser l’intelligence humaine et la répliquer, afin d’en doter les machines, continue.
Néanmoins, il aura fallu attendre 30 ans pour que Yann Lecun mette au point, en 1989, le premier réseau de neurones capable de reconnaître des chiffres écrits à la main. C’est d’ailleurs son invention qui est à l’origine du développement du deep learning. Cependant, ce qui a réellement causé le déclic et mis l’Intelligence Artificielle au bout de toutes les lèvres, c’est la défaite de Gary Kasparov. Effectivement, le 11 mai 1997, le champion du monde est battu, dans une partie d’échecs (sa discipline), par le système Deep Blue d’IBM. Depuis, cette technologie ne cesse d’évoluer, nettement impulser, surtout à partir de 2010, par les startups de la Tech et les GAFAM, désormais connus sous l’acronyme GAMAM.
Aujourd’hui, chaque petit progrès de l’Intelligence Artificielle fait la une de l’actualité et tout le monde, y compris les Etats, les investisseurs et les hommes d’affaires les plus puissants, cherche à capitaliser sur la donnée. Et ce, que ce soit de façon légale ou illégale. Or, dans un monde à la connectivité grandissante, la protection des données est, plus que jamais, un enjeu majeur et la préoccupation de toutes les économies.
Ainsi, afin de les protéger, les régulateurs, tels que par exemple l’Autorité de Régulation des Télécommunications et des Technologies de l’Information et de la Communication de Côte d’Ivoire (ARTCI), tentent, tant bien que mal, de jouer leur rôle. Mais, de toute évidence, ils ne sont pas assez outillés, juridiquement comme techniquement, pour mener des assauts massifs contre les cyberattaquants ou encadrer la propension des Intelligences Artificielles étroites (ANI), des IA profondes (AGI) et, encore moins, des super Intelligences Artificielles (ASI), dont les capacités sont supérieures à celles de l’homme.
Une propension qui effraie, au point où la théorie à la mode, ces temps-ci, est celle du « Grand Remplacement ». Interrogé sur la question pendant le CAF 2024, quelques heures avant son intervention au panel de clôture de l’évènement portant justement sur cette hypothèse, Reda Ben Geloune, le CEO de AITEK, une entreprise de référence dans le domaine de la distribution de solutions et de produits informatiques, ainsi que technologiques, en Côte d’Ivoire et en Afrique, s’est exprimé sur cette question.
Pour l’Alumni de Harvard Business School et HEC Paris, qui a, par ailleurs, soutenu, il y a 03 mois de cela, son Ph.D sur l’Intelligence Artificielle, obtenu chez Case Western Reserve University, « il faut faire bouger les lignes de la technologie et de l’économie numérique en Afrique, afin de stimuler la synergie, la mutualisation et la collaboration (…) Aujourd’hui, la cybersécurité est primordiale, car les guerres ne se font plus avec des armes conventionnelles : Elles sont désormais cybernétiques ! Dans ce contexte et plus que jamais, la Côte d’Ivoire doit se doter de compétences, pour s’adapter à l’environnement mondial (…)
Au sujet de l’Intelligence Artificielle et du Grand Remplacement, beaucoup de personnes s’inquiètent, sur le Continent. Elles sont inquiètes, parce qu’elles sont persuadées que l’IA va faire perdre des emplois en Afrique. Si les études montrent que l’Intelligence Artificielle va disrupter beaucoup d’emplois à forte valeur ajoutée en Europe (mathématiciens, financiers, journalistes, etc.), concernant l’Afrique, le futur est tout autre : l’Intelligence Artificielle va nous permettre de rattraper notre retard de productivité, par rapport au Vieux Continent, dans différents domaines clé comme l’agriculture, les mines et l’énergie (…)
Et nous permettra de réaliser un deuxième leap frog, après celui qui a été possible grâce à la démocratisation de l’internet et l’essor de la téléphonie mobile. Toutefois, l’IA a besoin de datas, de centre de stockage et de puissance énergétique, d’où l’impératif, pour nous, de bâtir les infrastructures solides et la réglementation nécessaires au développement de l’IA en Terre Mère. »
Il faut souligner que suite à l’enthousiasme initial suscité par l’annonce du Metaverse, en 2023, les spécialistes s’attendaient à l’arrivée d’un nouveau réseau social. D’un média social qui viendrait bousculer les géants de la scène. Au lieu de cela, surprise sur prise ! ChatGPT fut la révélation technologique majeure de cette année. Et pour cause, ce Modèle de Langage à Grande Échelle (LLM) a connu le meilleur démarrage de l’Histoire, avec 100 millions d’utilisateurs enregistrés dans les deux premiers mois de son lancement public. Et ce n’est pas tout !
Il a rapidement démontré sa capacité à transformer des secteurs stratégiques de nos économies, tels que l’Éducation, la Santé, la Finance, l’Énergie, la Sécurité… Justement, pour l’entrepreneur Ivoirien Stanislas Zézé, qui a modéré, le jour d’ouverture du CAF 2024, le panel « Invest In Tech : What’s Next », à une semaine de son propre évènement, « La Conférence Risques Pays » prévu le jeudi 25 avril 2024 dans les murs du même hôtel qui a abrité ce Cyber Africa Forum, le Sofitel Hôtel Ivoire de Cocody, « il y a une vraie évolution de la Tech et les Africains y portent de plus en plus d’intérêts ! »
Durant une conversation impromptue, que nous avons eu peu avant la cérémonie de clôture de la 4ème édition du CAF, l’homme aux chaussettes rouges, c’est ainsi qu’on l’appelle dans les milieux, fondateur de l’agence d’évaluation du risque de crédit Bloomfield Investment Corporation, estime que « maintenant et plus que jamais, l’Intelligence Artificielle est au cœur de toutes les discussions et, aussi, au centre de la révolution qui va permettre à l’Afrique de rattraper son retard industriel. Toutefois, les craintes sur cette technologie sont nombreuses ! Ces craintes sont relatives à la peur de ne pas être en mesure de maîtriser cette technologie, ou du moins à une certaine perception du risque (…)
Pour que nous puissions tirer profit de l’Intelligence Artificielle, il faut que les Africains prennent conscience qu’il nous faut réaliser des investissements massifs, pour développer une Intelligence Artificielle à notre image, adaptée à notre Continent. Des investissements conséquents, des secteurs privés et publics, nous permettront de donner naissance à cette Intelligence Artificielle adaptée, contextualisée à l’Afrique, car elle sera conçue en tenant compte de nos besoins et de nos réalités. »
Poursuivant sa révolution, le potentiel croissant de l’Intelligence Artificielle séduit de jour en jour les cybercriminels, pleinement conscients de l’intérêt accru pour les nouvelles technologies. Une stratégie qui se justifie aisément, puisqu’à mesure que ChatGPT devient viral, d’autres chatbots, alimentés par l’IA générative, pointent leur nez. Ces technologies ont été rapidement adoptées comme assistants dans divers domaines, notamment l’éducation, et les enseignants utilisent, dorénavant, des outils basés sur de grands modèles de langage (LLM) pour créer des plans de cours, formuler des problèmes mathématiques, ainsi que leurs e-mails envoyés aux parents. Les étudiants utilisent, également, ces outils dans leurs passe-temps, pour leurs devoirs et confient même leur santé mentale à des robots de type ChatGPT. Néanmoins, il faut garder en tête que les bienfaits ou méfaits d’un outil dépendent de l’intention de son utilisateur. Les experts de Kaspersky ont révélé que, faisant preuve de toujours plus d’ingéniosité pour réaliser leurs desseins malicieux, les cybercriminels ont ciblé, en 2023, un public plus large en déguisant un voleur de données en application de bureau ChatGPT. Pendant ce temps, valorisée à 134.662,500 milliards FCFA, la compagnie Chinoise ByteDance est la licorne à suivre de près.
KOFFI-KOUAKOU Laussin
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