Depuis l’annonce officielle du prix garanti de 1 800 F CFA par kilogramme de cacao pour la campagne 2024-2025, la Côte d’Ivoire fait face à une recrudescence alarmante des vols de fèves, tant dans les champs que sur les camions de transport. Une situation qui inquiète les producteurs, les transporteurs et les autorités, dans un pays où le cacao représente plus de 40 % des recettes d’exportation et près de 15 % du PIB.
Des producteurs sous pression
Dans plusieurs régions cacaoyères du pays, notamment dans le Sud-Ouest et le Centre-Ouest, les agriculteurs font état de pertes importantes. Les voleurs, parfois organisés en bandes armées, s’introduisent la nuit dans les plantations pour dérober des sacs de fèves prêtes à être livrées aux coopératives.
« Nous travaillons dur toute l’année pour entretenir nos plantations, et voilà que des individus sans scrupules viennent tout voler. À ce rythme, nous ne pourrons plus survivre », déplore Kouadio Yao, un producteur de Gagnoa. Certains agriculteurs se disent contraints de vendre leurs produits en dehors des circuits formels, à des acheteurs informels qui paient immédiatement mais à des prix inférieurs.
Des vols sur les routes
Les camions transportant le cacao des coopératives aux ports d’Abidjan et de San Pedro sont également la cible de braquages de plus en plus fréquents. Ces actes criminels, souvent bien planifiés, mettent en péril la chaîne d’approvisionnement du cacao, déjà fragilisée par les défis logistiques.
Un transporteur témoigne : « Ces derniers mois, nous avons perdu deux cargaisons entières. Les assaillants nous bloquent sur des routes secondaires et prennent tout, y compris nos véhicules. Nous avons peur pour notre sécurité. »
Le rôle du prix garanti
Le prix de 1 800 F CFA par kilogramme, fixé par le Conseil Café-Cacao (CCC), constitue une amélioration significative par rapport à celui de la campagne précédente. Bien qu’il soit une mesure visant à améliorer les revenus des producteurs, il aurait aussi attisé la convoitise des criminels, attirés par la hausse de la valeur des fèves.
« C’est un paradoxe inquiétant : alors que nous cherchons à mieux rémunérer les producteurs, cette augmentation du prix semble avoir des effets pervers », reconnaît un responsable du CCC sous couvert d’anonymat.
Des mesures pour endiguer le phénomène
Face à cette situation, les autorités ivoiriennes ont annoncé un renforcement des mesures de sécurité. La gendarmerie et la police nationale ont intensifié les patrouilles dans les zones de production et sur les axes routiers stratégiques. Des coopératives appellent également à la mise en place de systèmes de stockage plus sûrs et à une meilleure coordination avec les forces de l’ordre.
Cependant, des voix s’élèvent pour réclamer des solutions de long terme. « Il faut investir dans la sécurisation des plantations, former les producteurs à des pratiques de protection collective et moderniser la traçabilité du cacao. Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons freiner ce fléau », estime Daouda Traoré, un expert en économie agricole.
Une menace pour l’économie cacaoyère
La persistance de ces vols pourrait affecter non seulement les revenus des producteurs, mais aussi la compétitivité de la Côte d’Ivoire sur le marché international. Premier producteur mondial de cacao, le pays risque de perdre une partie de sa production au profit de circuits illégaux, ce qui pourrait ternir son image auprès des grands acheteurs internationaux.
Alors que la campagne bat son plein, la lutte contre les vols s’annonce cruciale pour préserver le pilier central de l’économie ivoirienne et garantir une répartition équitable des revenus générés par l’or brun.
En Côte d’Ivoire, le prix du cacao pour la campagne 2024/2025 a été fixé à 1 800 FCFA par kilogramme. Ce prix est en vigueur depuis le 1er octobre 2024.
Actuellement, les prix du cacao pour Janv-Mars 2025 sont de 7 120 FCFA/KG, tandis qu’ils sont prévus à 6 775 FCFA/KG pour Avril-Juin 2025. En 2025, la valeur du marché mondial des fèves de cacao pourrait atteindre 16,32 milliards de dollars.
Aimé Kouassi
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